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J.O’Dawan , la visite.


Il faut imaginer J.O’Dawan heureux . Il faut pour cela imaginer la scène , imaginer le décor .

Il est confortablement installé dans le salon de son appartement du 18ème ( siècle ) sur ce fauteuil de cuir mordoré acquis il y a des lustres chez un antiquaire de Pembridge Square dans le quartier de Notting Hill alors que jeune marié il y avait fait une escapade prétextant une vacation exceptionnelle d’ouvrages d’art chez Sotheby’s ( Londres ) , à une époque où seuls quelques véritables amateurs hantaient ces maisons de ventes , avant leur accession à cet état de temple de l’argent qu’elles sont devenues de nos jours .

Depuis longtemps déjà une sorte de sérénité intérieure s’est installée en lui , fruit d’une démarche thérapeutique l’ayant conduit vers la découverte d’un moi jusqu’alors ignoré dont de nombreux psychiatres et autres marchands de remise en état d’âmes avaient été les artisans au cours de ces dernières décennies .

De la fenêtre de son deux pièces-terrasse il contemple le va et vient des moineaux du quartier autour de ces restes de « hallot » émiettées dont il se plait à les partager avec eux , recréant ainsi ce bal aérien qui n’a rien à envier à un cérémonial religieux tant il trouvait dans le comportement des oisillons des similitudes avec cette ménagerie humaine qui l’entourait alors .Il ne disait rien et une fois encore , profitant d’un regard qu’il me lança subrepticement comme si , tiré d’un songe intérieur il s’apercevait soudain de ma présence à ses côtés , je lui demandai la permission comme j’en avais pris l’habitude lors de mes visites

bi-hebdomadaires , de promener innocemment mon regard dans un des nombreux cartons écornés dans lesquels il emmagasinait pêle-mêle des bribes d’existence sous forme de

croquis , de feuillets annotés , de vieilles lettres reçues des dizaines d’années plus tôt , ensemble que je me promettais , que je lui promettais de mettre en ordre au fur et à mesure de mes découvertes sachant combien sa confiance m’était acquise depuis ce jour où il s’était définitivement persuadé qu’il devait bien y avoir ici-bas quelqu’un qu’il pourrait considérer comme son alter-ego , un autre lui-même , sans restriction , sans limite : il s’appelait Bernard Sberro ; je fus celui-là .

« Qu’as- tu trouvé de si intéressant qui fasse naître ce sourire au coin de tes lèvres ? » me demanda-t-il soudain . 

« Rien , rien ou presque » pris au dépourvu et si peu habitué à ce type de question de sa part . et je poursuivis ma lecture de ces feuillets jaunis , subjugué par ce que j’y découvrais .

Depuis toujours une sorte de pudeur m’interdisait de m’immiscer dans tout ce qui touchait à son couple dont je me promettais de n’en découvrir l’histoire – riche , très riche dans mon imagination – qu’à pas feutrés . Autant sa vie d’aventurier me donnait le droit – j’en faisais même un devoir – de m’y pencher comme s’il s’était agi de ma propre histoire , autant dès que je voyais apparaître le simple prénom de Coleen , une pudeur , une sorte de gêne , parfois de honte , me donnait ce lourd sentiment d’intrusion déplacée , grossière .

Et pourtant …. 

Ce que j’avais sous les yeux semblait dater d’un temps où le papier , la calligraphie et le style étaient bien différents de ce qui se fait de nos jours ; bien différent de ce vocabulaire fait d’abréviations , d’acronymes et autres raccourcis qui semblent prendre le pas sur cette élégance d’écriture d’antan : une écriture très sérieuse comme elle le fut au cours de  la première moitié du siècle passé , une écriture délicate , en pattes de mouches , comme seul le Docteur Co à travers ses gros verres à monture myopique surmontés de son sempiternel chapeau aux bords relevés ( déjà son côté Co – boy ) pouvait envisager de l’exprimer .

Une vieille enveloppe postée d’ailleurs , un très beau timbre bleu-blanc-rouge aux couleurs délavées , une adresse :              

Société Lemarchant

Import – Export

A l’attention de Mademoiselle Co Lyne

13 Avenue de la République

 

LA MARSEILLE

 

J’oublie son contenu .

 

Me revient à l’esprit comme si c’était hier cette visite que je lui rendis adolescent lors d’une de mes premières journées passées à Paris , cette période où , quittant ma Tunis natale pour la première fois , pensant qu’il s’agissait d’un exil temporaire pour cause d’engagement verbal d’études sérieuses , toute adresse d’un quelconque coreligionnaire permettait à des parents soucieux , de savoir leur jeune fils moins égaré dans la grande ville .

« Va voir J.O’Dawan » me recommanda mon père , « c’était un gros client à l’époque et tu te sentiras moins seul dès ton arrivée…   parce que la famille … » 

Et c’est ainsi que dans les jours qui suivirent je me retrouvai 148 Boulevard du Montparnasse dans un atelier qu’il occupait alors , perché au septième étage et surmonté d’une immense terrasse avec vue plongeante sur le cimetière du même nom d’une part et vue panoramique sur les plus beaux édifices de la capitale ( y compris le Sacré – Cœur ) .

C’était un atelier qu’avait occupé durant de nombreuses années sa seule sérieuse liaison , cette artiste-peintre de la famille du banquier ( hormis son officiel mariage , juif celui-là ) et que sa fille mettait à sa disposition lors de ses absences matrimoniales . C’est dans cet immense capharnaüm que , les années aidant , j’appris à me situer au milieu de cette innombrable paperasserie d’où j’exhumai , en ce dimanche de grisaille , la lettre dont je me serais interdit

d‘en livrer le contenu si je n’avais eu l’intime conviction de la nécessité d’en dévoiler la teneur  , qui sait peut-être de la publier dans son intégralité , permettant ainsi de porter un regard neuf sur cette apparence bizarre que je lui trouvais parfois .

A qui appartient le courrier ? Cette question m’avait longtemps préoccupé , lancinante , évoluant vers un état quasi-obsessionnel jusqu’au jour où la réponse me parvint à travers la lecture d’un traité de droit de la propriété intellectuelle .

Publier un courrier adressé à Coleen , jeune , bien jeune à l’époque , belle , très belle surtout , m’obligeait à m’intéresser en premier lieu à l’identité de son auteur ; son auteur ? dois-je le répéter ? le docteur Co lui-même , son propre père , le gourou des temps anciens , décédé de nombreuses fois depuis sa première apparition , situation permettant de ce fait de considérer d’office ses divers écrits comme tombés dans le domaine public puisque sa seule descendance étant sa propre fille , dans ce cas particulier , la jurisprudence est formelle ( cf.sbid.rsslex ) ; quant au comité rédactionnel il est , dans une telle situation , seul habilité à en autoriser la publication .

J’imagine à présent que la situation est plus claire pour chacun : le décor est planté ………….

 

Bernard Sberro

                                           


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