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LE WEB DES JUIFS TUNISIENS

 

Echo à « un Juif errant »

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"J'ai quitté mon pays", nous avons quitté la terre et la culture de nos parents et nous nous sommes trouvés projetés dans la civilisation Occidentale, avec nos manques et la nostalgie de nos parents et grands-parents, juste après la shoah qui avait laissé son empreinte dans les mentalités des populations auxquelles nous nous sommes trouvés confrontés.

C’était en novembre 1957, c’était l’hiver, maman n’avait pas prévu de vêtements chauds et il faisait gris dans le cœur de mon inconsolable sœur aînée alors âgée de 14 ans. Il y avait la crise du logement en France, nos parents débarquaient avec peu de bagages mais beaucoup d'enfants, et ils cherchaient du travail. Pour comble, nous étions solidaires, nos familles nous recueillaient, le temps de nous établir. Cela dérangeait les mentalités.

Mon père fut d'abord recueilli à PARIS par un cousin de ma mère au sein d’une famille de dix enfants. C’est dans une ancienne écurie qu’il nous a abrités en plein hiver. Mon père avait recouvert la terre d'un balatum et nous avons vécu là avec mes six frères et sœurs en bas âge pendant trois mois.

La cohabitation devenue insupportable, maman a placé mes quatre grands frères en pension, Denfert- Rochereau, le temps de nous reloger disait-elle. Ce fut bref, quinze jours seulement, mais ce fut trop long dans une véritable prison d’enfants, l’enfer insoutenable dont la seule description réveille des souffrances qui leur avaient semblé durer d’interminables mois d’attente.

Papa, mon petit cordonnier, a trouvé du travail à Belleville. Puis, il a trouvé une loge de concierge, il a squatté la loge, et nous nous sommes entassés dans l'unique pièce pendant presque quatre longues années, devant en plus le partage de notre abri de fortune avec ma tante et son fiancé, puis ma grand-mère immigrants eux aussi. Autant dire que je n'ai jamais eu de lit avant l'âge de six ans.

Un jour de mes quatre ans, je suis tombée du lit superposé sur le visage. Sur ma lèvre éclatée, je porte encore la cicatrice de ce séjour dans notre squat. Mais il a fallu attendre jusqu’à ce que ma toute petite sœur décède un an plus tard à l'hôpital d'une crise de convulsion ou de l’incompétence de l’équipe médicale, pour qu'un service social se penche sur notre histoire, et qu'enfin il nous soit attribué en banlieue sud un appartement de cinq pièces. J'avais alors 6 ans.

Parfois, lorsque je fais mon ménage de Pessah, je me demande pourquoi j'ai pris une maison si grande, nous ne vivons qu'à cinq dedans, comme par hasard. Et puis je réalise que peut-être était-ce pour faire de la place à ma petite sœur. Mais elle ne reviendra plus jamais maintenant, je le sais, comme je sais que je ne retournerai plus jamais vivre en Tunisie maintenant, le mal est fait, et je crains pour elle que ses mauvais traitements envers les enfants d'Israël ne lui ait pas porté bonheur !

Finalement, j'ai perdu le droit de vivre et de grandir sur ma terre natale, j'ai perdu ma petite sœur âgée de 11 mois, mais j'ai trouvé une terre d'accueil, et j'ai maintenant une très grande maison, comme tous mes frères et sœur, d’ailleurs mon grand frère est devenu promoteur immobilier, le nom de mon père est affiché sur ses panneaux de construction. Quand nous jouions enfants dans notre loge avec WC sur cour, mes frères formulaient très souvent le rêve de devenir un jour milliardaires, bercés par les récits des riches commerces ensevelis dont mon grand père puis mon père avaient tour à tour été pillés.

Ambition très Feuj Tune, s’ils y sont peut-être parvenus, en tous cas ils n’ont rien coûté à la France. Leurs contributions sociales couvrent largement l’aide qui nous a été allouée dans notre enfance et s’ils sont tous entrepreneurs ou cadres supérieurs en Entreprises, ils contribuent à l’essor économique de la France à laquelle ils vouent une reconnaissance aveugle. La Tunisie regrette à présent son mauvais calcul, mais c’est que faire à présent, nous et nos enfants ne sommes-nous pas devenus Français, Américains, Anglais et citoyen adoptif de toute autre nation d’accueil ?

Moi je me suis enrichie de la langue française. Je m'y suis attachée comme à des racines spirituelles, je l’ai intériorisée. Je ne pourrais pas y renoncer pour un nouvel exode. Je n'en aurai pas le courage, même si j’aime parfois à délirer en langage TUNE surtout quand je me retrouve en famille ou parmi des amis Tunes en mal de d’ADRA. Mes parents n’avaient pas toutes les réponses à mes questions. J’ai dû me construire tant bien que mal grâce à mon environnement extérieur, lorsque c’était possible. Un de mes employeurs publiciste et poète me disait « Certains connaissent plusieurs langues, je préfère n’en posséder qu’une mais la maîtriser ». C’est vrai, nous connaissons plusieurs langues, mais qui sait si la maîtrise d’une langue apporte une meilleure communication. Où est l’essentiel pour chacun. Ceci-dit, c’était si souvent la HCHOUMA de ne pas savoir dire des mots élémentaires. Je me souviens n’avoir pas su longtemps traduire en français le mot « SAFAYE » qui veut tout simplement dire passoire. Evidemment pour filtrer le lait le matin au petit déjeuner, à la maison, on ne connaissait pas un autre mot, on disait « passe moi le safaye ». Les copines à l’école riaient de moi et ont fini par traduire presque systématiquement lorsqu’elles avaient compris que je n’osais plus demander la traduction d’un mot et que j’avais pris l’habitude de chercher à traduire globalement, en écoutant toute la phrase. Cela a probablement développé une autre forme d’intelligence, celle de l’apprentissage des langues étrangères…

En Tunisie, tout est resté à l'abandon, le désespoir y hante les rues désertes du passé de nos parents, même en pèlerinage, c'est effrayant, on n'a qu'une envie, c'est de reprendre l'avion vers AUJOURD'HUI. Parce que pour moi, la Tunisie c'est HIER et notre passé, et puisque « past is dead », à présent c'est la vie qui compte, elle continue de couler douce, nos enfants nous mène vers DEMAIN, renforcés par notre courage, notre culture et notre ouverture sociale.

Ce sont des cicatrices encore béantes qu'il conviendrait de refermer. Mais si pour guérir, toute blessure doit être cautérisée, pour moi, l'écriture en est le moyen suprême. Merci Jack de m’offrir d’exprimer l'ébauche d’un ouvrage autobiographique à travers ton site.

Si je m’y attelle, « ROSE DES SABLES EN OCCIDENT » sera illustré de poèmes du style de ceux édités dans le forum d’Harissa.com. Qu’en penses-tu ? Qu’en pensez-vous Monsieur le « Juif Errant » ?

 

Colette LELLOUCHE MOULY  pinhasmouly@free.fr

 


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